Atelier Populaire d’Urbanisme

A l’occasion du lancement du collège des maitrises d’usage, le 4 Juin 2022 avait lieu le premier Atelier Populaire d’Urbanisme (APU) portant sur le PPA (Plan Partenarial d’Aménagement), en voici le compte rendu :

Présentation

Suite à la profonde crise urbaine révélée par l’effondrement des immeubles de la rue d’Aubagne & les arrêtés de périls sur plusieurs centaines d’immeubles provoquant le délogement de milliers d’habitant.e.s, une nouvelle étape est en cours avec la planification d’opérations d’urbanisme visant à réhabiliter en profondeur des immeubles de plusieurs îlots urbains à Marseille.

Ces opérations sont planifiées à partir d’une démarche urbaine basée sur un outil créé par la loi ELAN (n°2018-1021 du 23 novembre 2018), le «Projet Partenarial d’Aménagement» (PPA). Le PPA associe de façon contractuelle la ville de Marseille, la Métropole, l’État et des sociétés d’aménagement, dans la lutte contre l’habitat indigne et pour l’aménagement urbain. Grâce aux mobilisations, les mouvements d’habitant.e.s et les associations ont réussi à s’imposer au sein du comité de pilotage de la démarche, sous la forme d’un Collège des Maîtrises d’Usages ou CoMU.

Ce premier atelier populaire d’urbanisme (APU) portant sur le PPA et préfigurant un cycle plus long dédié aux questions urbanistiques, a constitué le lancement du collège des maîtrises d’usages. Il s’est déroulé le samedi 4 Juin 2022 dans la grande salle du Centre de Culture Ouvrière Velten à Belsunce et a rassemblé des habitant.e.s, étudiant.e.s et associations ou collectifs de différents quartiers concernés par les futurs aménagements. La composition de l’assemblée était diversifiée, à côté des habitants du parc social ou du parc privé dégradé ou non (notamment des locataires de la résidence Eugène Pottier à la Villette, de Felix Pyat et des habitant.e.s concerné.e.s par les délogements), se tenaient des habitant.e.s propriétaires d’un logement dans le périmètre du grand centre ville et des étudiant.e.s, enseignant.e.s chercheur.e.s et quelques professionnel.le.s de l’urbanisme.

Cet atelier a été préparé en amont par un groupe venant des associations, collectifs, conseils citoyens des 1er et 3ème arrondissements avec en appui un groupe d’étudiant.e.s en architecture (enseignant.e.s Carole et Stéphane). Il a été précédé le jour même par un moment de convivialité dans le jardin du centre social où chacun.e a apporté quelque chose à partager pour un déjeuner collectif.

Les objectifs de la réunion étaient :

  • Réunir le collège des maîtrises d’usages élargi et informer sur le PPA, les problématiques, afin de soutenir l’organisation collective des habitant.e.s ;
  • Réaliser un diagnostic partagé sur les îlots expérimentateurs au niveau du logement, de la végétalisation, des équipements, de l’espace public et des mobilités ;
  • Envisager collectivement les prochaines étapes.

Déroulement de la rencontre

La rencontre a débuté par un mot d’introduction d’Hélène suivie d’une présentation d’un schéma du Plan Partenarial d’Aménagement (PPA) et du Collège des Maitrises d’Usages par Stéphane et Carole, mise à plat visuelle de l’ensemble du dispositif afin de mieux en comprendre les enjeux, à savoir qui précisément ? et quelles interactions avec qui ? pourquoi ? et sur quoi ?

Un premier tour de discussion s’est ouvert par des demandes de clarification sur le rôle d’un atelier populaire d’urbanisme (démarche de co-construction, démarche au long cours…), des questionnements sur la démarche (d’où vient la commande ?) et diverses interventions portant pêle-mêle sur l’Assistance à Maitrise d’Ouvrage à Noailles, la fabrique des taudis, le projet Euroméditerranée, les projets de démolitions à Eugène Pottier, la mixité sociale, le phénomène de spéculation foncière et immobilière, les délogements de population, les «squats » de migrants (…). Ces questions réponses ont été l’occasion de revenir sur l’historique de la création du collège, CoMU, nos expériences ici et là, charte du relogement, entraide, etc. et les compétences déployées par les collectifs d’habitant.e.s et les associations.

Pour cette première partie, les représentant.e.s de la ville, de l’État ou des bailleurs sociaux n’avaient pas été convié.e.s. Il a d’ailleurs été rappelé que le collège des maîtrises d’usages est avant tout une instance citoyenne qui vise à créer collectivement les conditions pour une participation des habitant.e.s, y compris et surtout de celles et ceux les plus éloigné.e.s de ce type d’exercice, aux projets d’aménagements et de réhabilitations des immeubles. Si cet espace peut permettre de créer les conditions d’un dialogue avec les institutions pour que des intentions se transforment en action particulièrement dans le domaine du logement indigne, c’est avant tout un lieu de construction d’une parole autonome des habitant.e.s et associations.

Pour la seconde partie de la rencontre, trois groupes animés par les étudiant.e.s en architecture, se sont formés autour des trois maquettes : les îlots à Noailles (Noailles Ventre et Noailles Delacroix) et deux îlots dans le 3ème, un à la Belle de Mai (Clovis Hugues Belle de Mai) et un à la Villette (Hoche-Versailles dans périmètre Euroméditerranée). Chaque groupe avait pour objectif de réaliser un diagnostic partagé sur le logement insalubre, la végétalisation, les équipements, les espaces publics et la mobilité. Les participants pouvaient utiliser des petits drapeaux de couleur pour localiser des immeubles insalubres, la présence ou l’absence d’espaces verts, d’équipements etc. Les habitants se sont appuyés sur leurs usages des lieux : connaissances de la localisation des logements insalubres, rues végétalisées par les habitants, les espaces vacants où il serait possible d’installer des équipements, etc.

Une restitution a eu lieu permettant de faire ressortir des points précis sur chacun des îlots. Ces restitutions ont été ponctuées par des interventions des membres d’un Centre Ville pour Tous (CVPT) et de l’APU de Grenoble pour apporter des connaissances sur opérations d’urbanisme. A noter également la présence de deux professionnels de la ville de Marseille. Il a été question également de droit à la ville et Simon, sociologue, a évoqué un projet en cours, la création d’un observatoire nationale du droit à la ville.

Plusieurs points importants sont ressortis de la restitution :

  • le besoin urgent d’équipements publics, d’espaces végétalisés, d’espaces publics et de solutions de mobilité dans les quartiers concernés.
  • Défendre une réhabilitation des îlots avec les habitant.e.s concerné.e.s par les opérations de démolitions et de délogement pour éviter qu’ils soient chassés de leurs quartiers.
  • Ouvrir le champ des possibles pour imaginer la ville voulue par les habitant.e.s notamment dans les espaces vacants et les immeubles vides.
  • Trouver un équilibre du fonctionnement du collège des maîtrises d’usages entre le soutien aux urgences (relogement, logement insalubre, …), les mobilisations (contre les démolitions à la résidence Eugène Pottier, la démolition de la Tour B de Felix Pyat, Noailles…) et la construction d’une vision partagée de la ville qui s’inscrit dans le temps long.
  • Rappeler la différence entre le périmètre fixé par le PPA et celui du Collège de Maîtrises d’Usages qui est plus large (cf. échanges autour de Felix Pyat, lien entre le PPA et l’ANRU, etc.).
  • S’appuyer sur les études existantes, les travaux d’étudiant.e.s, les diagnostics pour partager des connaissances existantes et co-construire à partir des usages des habitant.e.s.

En conclusion, il a été décidé d’organiser à l’automne 2022 des ateliers populaires d’urbanisme (APU) dans chaque îlot concerné par les opérations d’urbanisme pour permettre à un maximum d’habitants de pouvoir donner son avis et formuler des propositions sur la réhabilitation des immeubles et des quartiers.

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La lutte pour l’ouverture et la protection du jardin Levat continue

Il y a des luttes qui si elles n’apparaissent rarement au grand jour n’en sont pas moins manifestes.

Depuis cinq ans maintenant, les habitant. e. s du troisième arrondissement de Marseille luttent pour l’ouverture et la sauvegarde du jardin Levat.

Commençons par rappeler quelques étapes de cette histoire singulière. En 2016, les sœurs victimes du Sacré-Cœur de Jésus quittent le couvent fondé un siècle et demi auparavant quand la belle de mai était encore un paysage de vignes et d’oliviers, et laissent derrière elle un morceau de campagne en plein cœur de Marseille.

La mairie Gaudin rachète le couvent et le donne en gestion à l’association Juxtapoz dont la raison sociale est d’empêcher l’occupation de locaux vides en y développant des activités artistiques.

La décision est prise à l’insu des habitant. e. s qui l’apprendront par Télérama. Elle est vécue comme particulièrement injuste et inacceptable au regard du manque d’espaces verts dans un des quartiers les plus pauvres de Marseille.

Les associations et les habitant. e. s se mobilisent et obtiennent grâce à une série d’initiatives (pique-niques, assemblées, consultations auto-organisées) que le jardin s’ouvre enfin.

Depuis, des usages à la croisée des besoins du jardin et des besoins des habitant. e. s du quartier se cherchent, s’inventent et s’approfondissent. Des usages pédagogiques, thérapeutiques dont l’esprit pourrait se résumer ainsi : prends soin du jardin, il prendra soin de toi.

Si le jardin s’ouvre partiellement, de nombreuses préoccupations et revendications portées par les associations et les habitant. e. s du quartier restent sans réponse. Les heures d’ouverture du jardin sont insuffisantes ou inadaptées, et ne permettent pas aux personnes qui travaillent d’en profiter. La programmation estivale de Juxtapoz qui attire des milliers de personnes l’été, est en l’état incompatible avec le soin et l’attention que suppose le jardin, et le met en péril.

Enfin, la transformation du couvent exclusivement en cité des artistes tourne le dos aux besoins du quartier. Le couvent pourrait aussi accueillir une crèche, une maternelle, une médiathèque, une maison des associations, un Groupe d’Entraide Mutuelle, une réelle salle polyvalente pour les habitant. e. s, un centre de formation professionnelle dirigé vers la jeunesse du 3e, etc.

Enfin et plus modestement, les associations du quartier réclament de pouvoir avoir elles aussi usage du bâtiment. Là encore, elles restent à ce jour sans réponse.

Quant au désir exprimé par les habitant. e. s de pouvoir décider ensemble du devenir de ce lieu, ou de partager sa gouvernance, n’en parlons même pas.

La mairie centrale en renouvelant le bail de l’association Juxtapoz reconduit la décision de l’ancienne équipe municipale, et sa vision de la ville et de la culture.

Plutôt que de créer des infrastructures qui permettraient à une population pauvre d’exercer son droit à la ville, elle développe des activités artistiques qui ne lui sont simplement pas destinées, si ce n’est à la marge.

Plus encore, cette décision traduit le manque d’ambition de cette municipalité qui avait à l’endroit du couvent Levat la possibilité de déployer un projet exemplaire qui aurait rompu avec les politiques de gentrification pour déployer un projet horizontal faisant fond sur la richesse associative du quartier, avec l’ambition de répondre aux besoins fondamentaux en savoir, en culture, en éducation, en soin.

Bref, une politique populaire visant à améliorer les conditions de vie des habitant. e. s du quartier.

Ce constat fait, la lutte continue.

S’il est important de continuer de réclamer les infrastructures qui manquent au quartier, il faut aussi renforcer les usages populaires existants du jardin Levat.

De ce point de vue un chapitre important s’ouvre dont il faut décrire les enjeux.

Dans les prochaines semaines, les prochains jours, doit s’ouvrir un processus de concertation devant aboutir au choix d’un ou plusieurs opérateurs chargés de la gestion du jardin, et à la rédaction d’un cahier des charges à leurs destinations.

Les contours de cette concertation restent flous et de nombreux éléments hypothèquent son bon déroulement : les délais très courts annoncés (janvier à mars), la période (hiver), et enfin la cinquième vague d’épidémie de Covid.

Ce projet de concertation suscite un certain nombre d’inquiétudes et de questions :

Les conditions seront-elles réunies pour que cette concertation implique un maximum d’habitant. e. s, et d’acteurs associatifs ?

Les habitant. e. s, les actrices et acteurs de la vie associative seront-ils simplement consultés ou pourront-ils prendre part à la rédaction du cahier des charges et au choix de l’opérateur ?

Le futur opérateur en charge du jardin ne va-t-il pas rogner sur les formes de collaboration, d’entraide, et d’autogestion qui se sont fabriquées chemin faisant ?

La concertation, et l’opérateur choisi, vont-ils permettre de développer et pérenniser la gestion collective du jardin, et les usages existants ?

Enfin, si à l’occasion de cette concertation, des règles d’usages du jardin sont élaborées collectivement, l’association Juxtapoz est-elle prête à les respecter, et à modifier sa programmation estivale en conséquence ?

Après deux réunions de préparation, l’association Juxtapoz refuse de prendre en compte les demandes et inquiétudes des usagers du jardin.

Nous invitons les multiples habitant. e. s du quartier, les associations, et tous ceux qui se soucient du devenir du couvent et de son jardin, à faire entendre leurs voix pour défendre un usage populaire du couvent Levat.

Des usagers et usagères du Jardin Levat.

Contact : 1_collectif_levat@riseup.net

Péril sur la ville

Un été dans le quotidien animé des habitants de la butte Bellevue, dans le quartier populaire de Saint-Mauront, au cœur de Marseille… Le premier documentaire du journaliste marseillais Philippe Pujol, prix Albert-Londres 2014.

Pour accéder à la butte Bellevue, Kader file à scooter à vive allure, sans casque et en claquettes, à travers les rues serpentines du 3e arrondissement de Marseille. C’est l’été, les jets d’eau fusent et les cris des minots résonnent dans les ruelles. Ici, dans l’un des quartiers les plus pauvres de France, on ne trouve plus de commerces. Même le local du Parti communiste a baissé le rideau. « On nous a abandonnés« , peste Mme Tabet, surnommée « la shérif » par les jeunes. Malgré la misère, certains se prennent à rêver. Petit voyou repenti, Kader se voit acteur de cinéma quand Nour, qui s’est installée seule dans le quartier après avoir fui les coups de sa famille, s’imagine « à Londres, dans un loft, fumant une Vogue« . À l’Œuvre Paul-Hava, le père Vincent, un prêtre haut en couleur, prend soin de tout ce « village », où l’on parle italien, arabe ou comorien. Cet été-là, les habitants s’inquiètent de l’ouverture, votée par la mairie, d’une voie à double sens pour désengorger la butte. Ils redoutent l’enlaidissement de leur quartier et la disparition de son âme.

À juste distance
Pour son premier film, le journaliste marseillais Philippe Pujol, prix Albert-Londres 2014, s’est immergé dans le huis clos de la populaire butte Bellevue, située dans le quartier de Saint-Mauront, au plus près de ses habitants. À juste distance et sans misérabilisme, il capte des récits de vies abîmées et le désœuvrement d’une jeunesse depuis trop longtemps oubliée. Il montre aussi l’élan collectif contre l’aseptisation programmée du quartier, l’entraide et les moments de joie, comme celle éprouvée lorsque des « grands », sous un soleil brûlant, ouvrent les vannes sur les trottoirs. Une immersion à la fois lumineuse et touchante dans un morceau de France, laboratoire menacé du vivre-ensemble.

A visionner ici :

BDM à l’assaut du ciel

En 1871, le vent du soulèvement pour la justice sociale porté par les communards gagne Marseille. Un des premiers bataillons à se soulever sera celui de la Belle de mai. Partant du Boulevard de la Révolution et composé de plus de 60 % d’immigré.e.s, il est le premier à prendre les armes et le dernier à les déposer.

Avec près de 200 adolescents, Organon art compagnie est partie à la recherche des héritiers du Bataillon de la Belle de Mai, recherche concrétisée par un spectacle « Belle de mai, à l’assaut du ciel ».

Depuis le drame de la rue d’Aubagne, beaucoup auraient aperçu son fantôme, notamment dans l’entraide incroyable dont ce quartier a été capable pendant l’épidemie .

Comme en 1871, beaucoup se sont soulevés afin de traduire en acte une société de coopération qui redéfinisse le sens du mot Justice. Renouant avec la tradition du journal de mur, chère à la Commune de 1871, Organon art compagnie propose tous les 15 jours une nouvelle affiche-édition déployée dans toute la Belle de mai.

On y trouvera tel quel ou sous forme de QRcode à flasher des textes, reportages, urbex, danses,chants, jeux écrits par les enfants et adolescents du quartier, mais aussi toutes les informations utiles et nécessaires à la solidarité et l’entraide vers les plus fragilisés par la crise sanitaire et sociale.

Les murs vous parlent à la Belle de mai !

Vous pourrez voir un extrait du spectacle « Belle de mai à l’assaut du ciel » le mercredi 1er juillet à 18h au couvent Levat, 52 rue levat, lors de la soirée d’ouverture de la saison du couvent Levat.

Solidarités 13003

Suite aux difficultés rencontrées par les habitants pendant et après la pandémie,  un Collectif d’Habitants Organisés du 3ème (CHO) a mis en place un système d’entraide pour que personne ne soit seul/e dans le quartier.

Voici une publication du CHO à conserver et à faire passer à vos voisins